Dans le cadre de ce travail de candidature, ce sont donc notamment les aspects historiques, topographiques et archéologiques de l’oeuvre, souvent négligés, qui ont été pris en compte. Plus précisément, le travail consiste à évaluer la place de la Rome tardo-républicaine et impériale dans les commentaires serviens à l’Énéide et aux Géorgiques de Virgile. Ainsi, le travail précise dans quelle mesure notre auteur a agi comme un véritable antiquaire, lorsqu’il a mentionné et commenté, là où le commentaire de Virgile le permettait, des événements et personnages historiques, des monuments, des statues, des colonnes, des lieux de culte, etc. En ce qui concerne les scolies à caractère archéologique et topographique, nous analysons de surcroît si les références à la Rome sont correctes au regard des recherches archéologiques et historiques plus récentes, voire si elles permettent d’enrichir ces dernières. Une méthode d’analyse interdisciplinaire a de ce fait été mise en oeuvre.

Nous ne négligeons pas non plus la spécificité générique de cette oeuvre, dans laquelle un auteur du IVe siècle s’intéresse à des éléments de l’histoire de l’ère tardo-républicaine et impériale à travers le texte d’un poète contemporain d’Auguste. Bien au contraire, ce perspectivisme culturel est un des défis méthodologiques essentiels auxquels l’oeuvre de Servius nous confronte. Cette étude permet par conséquent également d’avoir une meilleure connaissance de la façon dont on a lu Virgile dans l’Antiquité tardive en soulevant ainsi la question de la réception de l’oeuvre virgilienne.

Il faut toujours garder à l’esprit aussi qu’il s’agit là de l’explanatio d’un grammaticus : se pose alors la question de la manière dont on fait étudier un sujet aux jeunes auditeurs. Nous vérifions dès lors si la visée première des gloses à caractère historique a bel et bien été, comme le réclamait notamment Quintilien, de transmettre aux jeunes générations une image vivante du passé et de leur montrer sa valeur exemplaire. Cette hypothèse s’est confirmée et correspond en même temps, d’un point de vue idéologique, au projet des intellectuels païens de l’Antiquité tardive, projet qui consistait à maintenir en vie l’héritage du passé.

Ainsi, ce travail de candidature place au centre des recherches une oeuvre antique majeure, mais quelque peu délaissée. L’étude est consacrée au caractère historique, topographique et archéologique que revêtent de nombreuses gloses ; elle a permis de constituer un corpus Ŕ qui n’existait pas jusqu’ici Ŕ de toutes les occurrences qui font allusion à la Rome tardo-républicaine et impériale. Soulignons enfin que l’oeuvre servienne n’a jamais été traduite : à cet égard aussi, ce travail a permis de combler quelques lacunes au niveau de la connaissance du monde de l’Antiquité.